Lutter contre l’uniformisation des images

29 septembre 2023

© WARNER BROS/HAWK FILMS/KOBAL/SHUTTERSTOCK

Il y a quelque temps, j’ai commencé à suivre une directrice artistique photo, Emily Keegin, hyper intéressante qui analyse régulièrement des séries et tendances photo. Dans son viseur récemment : la lumière « dystopique » de la dernière campagne Apple ou les compositions rébarbatives

Résumons ces deux tendances.

Concernant la lumière « dystopique », elle concerne toutes ces images reproduisant une genre de golden hour mais sans contraste, avec de la lumière dans les ombres. Comme s’il y avait deux soleils en fait. C’est donc une lumière très peu réaliste mais qu’on voit un peu partout dans l’univers « still life » ou d’architecture d’intérieur, surtout en publicité. Ça donne une impression à laquelle je me suis habituée mais en mettant le doigt dessus, très dérangeante : celle d’un monde chaleureux artificiellement, celui d’Ira Levin dans Un bonheur insoutenable ou d’Aldous Huxley. Vous saisissez l’idée. Le plus terrible étant que cette lumière artificielle de faux coucher de soleil existe réellement lors de certains phénomènes météorologiques ou incendies, de plus en plus fréquents. Une lumière qui ne serait plus tellement dystopique malheureusement.

Mais revenons à nos moutons, on parlait d’uniformisation de l’art. Emily Keegin montre aussi à quel point, nous, photographes et créatifs, mettons nos sujets au centre de l’image, sans trop réfléchir à la composition. La faute notamment à Instagram, lieu de diffusion majoritaire de nos images. Nous « scrollons », faisant apparaître brièvement les photos de haut en bas. Alors qu’en presse, les formats sont horizontaux pour les doubles pages, avec de l’espace pour le texte (et à une époque des très très gros budgets). Elle prend l’exemple d’Annie Leibovitz qui même avec des formats verticaux décentre ses sujets.

Et c’est vrai, qu’on a vite fait de rester dans notre petit confort visuel. Sans compter que les budgets de plus en plus serrés ne poussent pas à la créativité.

Ces deux exemples m’ont beaucoup interpellée. Je travaille surtout pour du commercial, où l’on me demande de bien montrer les produits. Je me suis mise à faire de la photo « boring » comme le dit Emily ! Alors qu’à la base, je vouais un culte à la règle des tiers ! Heureusement que quand je regarde mon feed Instagram, j’y vois certaines images avec des compositions réfléchies car sinon je ne pourrais pas me regarder dans une glace ! Ça m’a tout de même alertée et je vais redoubler de vigilance à l’avenir.

Car l’uniformisation du contenu tue la créativité. On ne produit plus que des images qui pour être vues doivent plaire et donc répondre aux caractéristiques « artistiques » du moment. C’est un cercle vicieux. Prenons donc conscience de ces lumières, de ces cadrages, de ces beautés qui se ressemblent tous, aiguisons notre esprit d’analyse, et forgeons notre propre goût, s’il en est encore temps.

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